Votre élevage est-il prêt au tarissement sélectif ?

Votre élevage est-il prêt au tarissement sélectif ?

Depuis 2012, deux plans éco-antibio successifs incitent les éleveurs à modifier leurs pratiques d’utilisation des antibiotiques. A ces incitations règlementaires s’ajoute la demande sociétale qui ne doit pas être occultée. Les pratiques sanitaires autour du tarissement font partie de celles les plus délicates à gérer et à expliquer. En effet, comment justifier l’usage systématique d’antibiotiques au tarissement quel que soit le statut cellulaire de la vache ?

La mise en place du tarissement sélectif est appelée à se développer dans les élevages. Le principe n’est pas de supprimer complètement l’usage des antibiotiques au tarissement mais au contraire d’adapter cet usage en s’appuyant sur les résultats cellulaires de vos vaches. La visite sanitaire réalisée par votre vétérinaire est le bon moment pour déterminer avec vous les bons protocoles de traitement selon le profil de votre élevage. Dans les grandes lignes, on retiendra 3 grandes orientations :
  1. Vache saine* : Obturateurs sans antibiotique
  2. Vache infectée depuis peu : Traitement Antibiotique (avec ou sans Obturateurs)
  3. Vache infectée durablement : Soit un traitement antibiotique « renforcé » si la vache présente un bon intérêt économique soit réforme.

*Voir définition en fin d’article

L’application d’un tel protocole nécessite d’être encore plus vigilant sur l’hygiène et les conditions de logement. En effet, l’utilisation d’antibiotique est plus « sécurisante » en atténuant l’impact de certains facteurs de risque qui peuvent très rapidement accroître et se payer très cher.

Le double objectif du tarissement

Curatif

Comment je soigne les vaches qui ne l’ont pas été en lactation ?

Préventif

Comment puis-je éviter que les vaches ne s’infectent pendant le tarissement ?

L’importance d’un tarissement réussi !

L’exemple suivant démontre qu’avec une situation de départ identique (même nombre de vaches saines et infectées) la situation après tarissement de ces deux élevages est tout à fait différente.

exemple de situations de tarissement

Dans le cas n°1 : 

43 vaches sont saines après le tarissement (35+8). Le taux de vaches saine a diminué de 14 points après tarissement malgré un côté curatif satisfaisant. Les mesures de prévention mises en place sont insuffisantes dans ce cas.

Dans le cas n°2 : 

Les infections sont maîtrisées mais les guérisons sont perfectibles. Cependant le taux de vaches saines augmente de 8 points.

Pour que le tarissement soit réellement une remise à zéro des compteurs, il ne faut négliger ni le curatif, ni le préventif !

le port de gants lors de la réalisation de traitement permet de limiter les risques de contamination par les mains
Ce n'est pas le cas sur la photo, mais le port de gants lors de la réalisation de traitement permet de limiter les risques de contamination par les mains

Analyser la lactation pour choisir la stratégie

Pour limiter l’utilisation d’antibiotique en utilisant uniquement des obturateurs, il faudra avoir un maximum de vaches qui ne se sont pas infectées pendant leur lactation.

Ainsi, une étude pour comprendre les interactions entre ce qu’il se passe pendant la lactation de la vache et son tarissement a été menée en croisant les critères d’infection en lactation, au tarissement ainsi que les taux de guérison au tarissement.

Deux grandes tendances se dégagent :

  • Plus le taux cellulaire* et l’IGL* augmentent, moins le taux de guérison au tarissement* est important et plus il y a d’infections au tarissement*.
  • Plus le pourcentage de vaches saines* est important, plus le taux de guérison au tarissement* est élevé et les infections au tarissement* sont faibles.

*Voir définitions en fin d’article

Pour aller plus loin que ces conclusions, un outil prédictif permet à chaque éleveur de situer son élevage sur les taux d’infection et de guérison au tarissement qu’il peut espérer en fonction du taux d’infection en lactation. En effet, il n’est pas raisonnable de faire du tarissement sélectif avec un taux d’infection au tarissement trop élevé tout en utilisant des antibiotiques.

Un exemple parlant

Voici un exemple d’utilisation de cet outil au « Gaec de la Bonne Image » qui souhaite mettre en place le tarissement sélectif. La situation initiale se caractérise par :

  • un taux cellulaire de 350 000,
  • un taux de vaches saines de 82%,
  • un IGL de 11%

Avec ces éléments l’outil calcule le risque pris actuellement avant de passer au tarissement sélectif :

Niveau de risque « guérison »
Risque élevé
Niveau de risque « infection »
Risque limité

L’IGL indique qu’en moyenne 11% des vaches s’infectent tous les mois. Des animaux vont arriver au tarissement en étant infectés depuis plusieurs mois rendant leur guérison difficile pendant cette période.

Par contre, en moyenne, les élevages qui présentent ce type de résultats ont un taux de nouvelles infectées au tarissement limité.

Concrètement, cela signifie que l’amélioration du taux de guérison au tarissement passe prioritairement par une meilleure gestion des infections en lactation. L’élevage a tout de même un profil intéressant pour engager une réflexion sur le tarissement sélectif à condition d’être irréprochable sur la technique de tarissement et les conditions de logement des taries.

Disponible auprès de votre conseiller d’élevage, l’outil s’appuie sur les résultats des éleveurs suivis par Avenir Conseil Élevage. Il suffira de saisir votre proportion de vaches saines, votre taux cellulaire et votre taux d’IGL, pour obtenir le niveau de risque actuel que vous prenez pour les taux de guérison et d’infection au tarissement. C’est donc une étape préalable indispensable pour aller plus loin dans la réflexion sur le tarissement sélectif.

Laurie Meunier
Conseillère à Avenir Conseil Élevage

Relecture par le Dr Ghyselinck, vétérinaire 

Quelques définitions pour bien comprendre

Le pourcentage de vaches saines : Proportion de comptages de vaches à moins de 300 000 cellules par rapport à l’ensemble des comptages sur une période ( d’un an ou d’un contrôle)

IGL : Incidence Globale en lactation, c’est le taux d’infection des vaches d’un contrôle à l’autre. Il se définit en moyenne annuelle.

Taux cellulaire : Moyenne des taux cellulaires du troupeau des différents contrôles de l’année.

Taux de guérison au tarissement : Il s’agit de la proportion d’animaux qui a fini sa lactation précédente à plus de 300 000 cellules et qui redémarrent à moins de 300 000 cellules. Ce critère évoluera certainement à terme sur des seuils à 100 000 cellules, plus réaliste dans la gestion du tarissement sélectif.

Taux de nouvelles infections au tarissement : Il s’agit de la proportion d’animaux qui a fini sa lactation précédente à moins de 300 000 cellules et qui redémarre sa lactation à plus de 300 000 cellules