Cas de Conseil : 200 kg à 6 mois, c'est fait !

Cas de Conseil : 200 kg à 6 mois, c'est fait !

Nous avons l’habitude de dire que les génisses sont le capital d’avenir du troupeau. Cette formule simple à comprendre n’est pas si simple à concrétiser. C’est le constat fait en 2017 par Samuel Halleux, éleveur dans l’Aisne. Hélène Berlemont, conseillère d’élevage à Avenir Conseil Élevage, revient dans ce « Cas de Conseil » sur le suivi mis en place avec les résultats obtenus.

Peux-tu nous expliquer l’origine de la réflexion Samuel Halleux sur l’élevage de ses génisses ?

Hélène B. : L’objectif de Samuel est d’avoir deux périodes de vêlages : à l’automne (septembre – novembre) et en sortie d’hiver avant la pousse de l’herbe. Cette stratégie implique une grande vigilance sur l’objectif d’âge au vêlage pour ne pas déraper et finalement revenir à un étalement des vêlages.

Pour inséminer au bon moment nous avions l’habitude de mesurer au ruban le gabarit et le poids des génisses. Mais souvent, les références obtenues étaient inférieures aux objectifs de croissance (350 kg alors que l’objectif est de 400 kg à 15 mois). Ce qui ne permettait pas de faire vêler à 24 mois, l’âge moyen était plutôt de 30 mois.

Il fallait donc booster la croissance des génisses pour avancer l’âge au vêlage et ainsi qu’une génisse née à l’automne vêle à l’automne 2 ans plus tard.

Quelles actions ont été menées ?

Hélène B. : Début 2017, avec Samuel, nous avons convenu d’engager ensemble un suivi de la croissance des génisses régulier avec 4 pesées bascule par an : avant, pendant et à la fin de la saison de pâturage et une fois l’hiver. La pesée avec bascule donne des résultats plus précis et plus fiables que les mesures au ruban. La régularité permet de décortiquer les phases d’alimentation et de croissance pour ensuite cibler les leviers d’amélioration à actionner et ainsi progresser plus vite. En parallèle, Olivier Lebleu, spécialiste de l’élevage des Génisses à Avenir Conseil Élevage, est intervenu pour faire un état des lieux complet et apporter son expertise.

Quelles ont été les conclusions de cet état des lieux ?

Hélène B. : Du tarissement des vaches aux vêlages des génisses, tout a été passé en revue : le logement, l’alimentation avec la qualité de l’eau de boisson, le sanitaire, le colostrum…

Le déficit de croissance a été établi. Dès la naissance, les veaux avaient un poids un peu faible. Pour ce point nous avons revu la ration des vaches taries en relevant les apports d’énergie et de PDI. Elles ont 8 UFL et 800 g de PDI dès le début du tarissement et 3 semaines avant le vêlage, quelle que soit la saison, Samuel les rentre en bâtiment pour augmenter à 10 UFL et 1000 g de PDI.

Ensuite, nous avons changé la poudre de lait pour une version plus riche en MAT et en MG. La concentration a également été adaptée aux objectifs de croissance.

Grâce aux pesées régulières, nous avons aussi très rapidement revu la conduite au pâturage. Les pesées estivales ont montré que les croissances n’étaient pas suffisantes pendant cette période. On était un peu sévère : les génisses n’avaient pas suffisamment d’herbe jeune et devaient compenser pendant l’hiver. Maintenant, Samuel est plus vigilant à la hauteur d’herbe (à l’aide d’un herbomètre) et les génisses rentrent un peu plus tôt dans les paddocks.

Sur l’aspect sanitaire, il y avait quelques problèmes de toux sur les jeunes veaux. La ventilation a été revue pour limiter les courants d’air et les veaux vaccinés. La situation s’est bien améliorée.

Quels sont concrètement les résultats ?

Hélène B. : Quand on travaille sur l’élevage des génisses il faut bien avoir conscience que c’est sur du moyen voire du long terme. Après 2 ans, les résultats sont là ! Les pesées montrent que la phase lactée assure la croissance de 0 à 6 mois. C’est primordial puisque le retard pris pendant cette période ne se rattrape jamais par la suite. Les poids à 15 mois atteignent ou sont proches d’atteindre l’objectif pour l’insémination, et finalement l’âge au vêlage est de 24,3 mois en 2020, soit 6 mois de gagnés par rapport à la situation de départ !

Née en Poids de naissance
Obj. > 40 kg*
Poids à 3 mois
Obj. 120 kg*
Poids à 6 mois
Obj. 200 kg*
Poids à 15 mois
Obj. 400 kg*
201540
201639174350
201738102180342
201840105192342
Début 201939110185368
Fin 201941116207401

*Les objectifs sont donnés pour la race Holstein, celui de 400 kg correspond à l’objectif d’un vêlage 24 mois.

Pour ce qui est des génisses de 2020, il s’agit de la première génération née du croisement 3 voies dans lequel s’est engagé Samuel (croisement Jersiaise – Rouge Suédoise – Holstein). Nous adapterons les objectifs et les références à ces animaux et resterons vigilants !

La première raison pour laquelle je vise un âge au vêlage de 24 mois, c’est la valorisation de l’herbe avec une orientation génétique selon de la période de vêlage : Holstein en automne et croissement Holstein x Rouge Norvégienne x Jersiaise en fin d’hiver. Cet objectif ne peut être tenu que si les génisses vêlent à la période où elles sont nées. La deuxième raison, c’est de maximiser les ressources fourragères pour les vaches laitières en réduisant le nombre de génisses présentes.

Samuel Halleux

Le mot de l’expert

L’objectif d’âge au vêlage de 24 mois est atteint et la mortalité des veaux a baissé de 5 points. Ce qui montre très concrètement qu’avec des pesées régulières (2 par an est un minimum), un suivi attentif et une volonté de progrès partagée, il est possible de gagner énormément à condition d’être patient.

Un dernier chiffre pour l’illustrer concerne la qualité du renouvellement. Le taux de primipares saines du troupeau de Samuel plafonnait à 87% jusqu’en 2019. Pour 2020, il atteint 93% ! Quand on sait qu’une primipare sans cellules a toutes chances de faire une longue carrière avec un lait de qualité les gains potentiels sont conséquents.

Olivier Lebleu, conseiller spécialiste de l’élevage des Génisses à ACE.

Si vous aussi vous souhaitez travailler sur la croissance des génisses, l’âge au vêlage ou un autre objectif, laissez-nous un petit message via le formulaire ci-dessous pour en discuter.