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Robot de traite : Points communs entre deux transitions réussies

Le passage de la salle de traite au robot de traite ne s’improvise pas. Le robot entraine des adaptations au niveau de la conduite technique, économique et humaine de l’élevage : mode de distribution des concentrés, nouvelles façons de travailler, prise en main de l’outil et de son logiciel… Deux éleveurs reviennent sur les temps forts de cette période marquante de la vie de leur exploitation.

Réussir l’automatisation de la traite du troupeau nécessite une réflexion du projet pendant au moins deux années. Tout d’abord, il est nécessaire de vérifier l’adéquation du robot avec ses objectifs humains et de conduite technique. Ainsi, Valentin Crimet, éleveur dans la Somme et Louis Baron, éleveur dans le Nord, exposent l’origine de leurs projets et la méthodologie retenue.

Louis Baron
Valentin Crimet

Louis Baron et Valentin Crimet

Pour les deux éleveurs, passer à la traite robotisée n’était pas une option envisagée quelques années auparavant. « En 2016, j’étais même un peu anti-robot », commence Valentin Crimet pour expliquer l’origine de l’installation de deux robots Lely en mars 2023. A cette époque, l’éleveur étudie l’amélioration du bloc traite avec l’achat d’un roto : « mais la crise laitière m’a contraint à revoir le niveau d’investissement et j’ai préféré faire évoluer la salle de traite de 2×6 postes à 2×10. » A Steenwerck dans le Nord, Louis Baron expose le contexte suivant : « le robot de traite n’était pas dans le projet lors de mon installation en 2020. A ce moment, nous trayions 75 à 80 vaches avec une 2×7 en bon état de fonctionnement. Et avec un salarié à mi-temps, la main-d’œuvre ne posait pas de problème sur la ferme. »

Main-d’œuvre et santé au cœur de la réflexion

Dans les deux situations, le départ d’un salarié et la difficulté à le remplacer imposent la nécessité d’envisager une alternative. « A ce moment (ndlr. en octobre 2021), mon père commençait à ressentir une certaine lassitude physique de la traite. L’hypothèse du robot s’est alors imposée, même si nous n’envisagions pas de gagner du temps mais plutôt de gagner en souplesse d’organisation et aussi en attractivité. Le robot réduit la pénibilité et c’est un plus pour les jeunes qui se présentent à l’embauche », explique Louis Baron.

Un peu plus tôt, un souci de santé couplé à des départs successifs de salariés ont incité Valentin Crimet à revoir également sa position sur la traite robotisée avec des réserves sur le gain de temps, « par rapport à une salle de traite, le robot peut être bénéfique sur la charge de travail lorsqu’il n’y a pas trop de fraîches vêlées et à condition de ne pas avoir de vaches à problèmes (mammites, pattes…). »

Un temps d’analyse des solutions

Pour aborder leurs réflexions, les deux éleveurs contactent les commerciaux des différentes marques et leurs conseillers d’élevage. Ces derniers insistent sur l’importance de visiter plusieurs installations afin de visualiser concrètement les différences et recueillir le ressenti des éleveurs. « Je voulais voir des situations équivalentes à la mienne : des vaches qui sortent en pâture sans forcément maximiser le niveau de production du troupeau. Ce qui m’a convaincu, c’est la tranquillité d’esprit des éleveurs rencontrés qui cherchaient la fluidité et l’efficacité de l’outil sans courir après la performance », explique Valentin. Il faut dire que son troupeau, mené en croisement 3 voies, est adapté pour valoriser les surfaces en herbe de l’exploitation.

Bien évidemment le coût (achat et entretien) est un facteur déterminant dans le choix de la marque, mais l’étude de l’implantation du robot, la circulation des animaux et les objectifs de conduite du troupeau sont des critères de choix. D’après les éleveurs, chaque marque a ses atouts. Pour les aider à faire leur choix, Guillaume Crépel, conseiller spécialisé Robot d’ACE, a apporté son expertise pour « peaufiner » les plans. « La circulation de Delaval nous convenait bien ; nous avons juste adapté la position de la porte de tri. Après avoir mangé, les vaches sont dirigées, soit vers le robot, soit vers la zone de couchage. C’est un détail qui a son importance », souligne Louis Baron, alors que chez Valentin Crimet : « C’est Guillaume qui a adapté l’implantation, dans l’objectif de faire pâturer en plaçant les deux robots tête à tête ce qui permettra de trier les animaux à la sortie ».

Adapter l’effectif du troupeau

Autre point commun, la baisse des effectifs a facilité la transition dans les deux élevages. « Il y avait 145 vaches à la traite en septembre 2022, c’était un peu plus que d’habitude pour prendre un peu d’avance sur la production annuelle, car très vite nous avons réduit, à 120 en novembre, puis 100 en décembre pour une mise en route prévue en février 2023 », détaille Valentin. Outre l’adaptation de l’effectif, Louis Baron revient sur des points de vigilance : « Dès que nous avons décidé d’installer un robot, nous avons porté un peu plus d’attention aux index mamelles et membres dans nos choix génétiques. Et quelques mois avant la mise en route, nous avons augmenté la fréquence de passage du pareur afin de traiter les problématiques de pattes et instaurer du parage préventif ».

Pour faciliter la mise en route, les deux troupeaux n’ont plus eu accès au pâturage. L’alimentation a été adaptée en concertation avec les conseillers d’élevage. « Les vaches avaient un correcteur à base de soja et de colza au DAC, elles le consomment désormais au robot. Sur les conseils de Guillaume, nous n’avons pas opté pour un VL de production au robot et aujourd’hui cela fonctionne très bien sans avoir augmenté significativement la quantité de concentrés distribuée », détaille Louis. Le rythme des distributions est également un levier d’action pour gérer cette période délicate : à l’approche de la transition, Valentin Crimet a augmenté le nombre de distributions de la ration à l’auge afin de casser la routine des vaches.

Deux semaines éprouvantes

C’est finalement en mars 2023 et en juin 2023 que Valentin et Louis ont respectivement mis en service leurs robots. Tous les deux ont basculé d’un système de traite à l’autre du jour au lendemain en anticipant la charge de travail. « Je savais que les 15 jours qui suivraient seraient très intenses, ça demande même une présence quasi permanente pendant 2 à 3 jours ! Fort heureusement début juin est une période un peu moins chargée. Si la mise en route est prévue pendant une période de forte charge de travail, je pense qu’il ne faut pas hésiter à la décaler et surtout à prévoir du monde pour ne pas être seul », explique Louis. Le récit de Valentin est similaire : « Nous avions constitué des lots de 25 vaches environ, au début il faut les pousser une à une. Même si j’avais anticipé avec le renfort du service de remplacement et la présence des salariés, la première semaine est extrêmement stressante et fatigante. Mais à la 3ème semaine je savais que j’avais fait les bons choix ».

Quelques mois après, les deux éleveurs font le même constat : passer à la traite robotisée ne s’improvise pas, l’accompagnement en amont pour faire les bons choix et préparer le troupeau leur a permis de vivre plus sereinement leur projet. Et, dernière similitude, tous les deux vont désormais pouvoir préparer la mise en place de leur stratégie de mise à l’herbe des vaches pour le printemps 2024.

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